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Vols à main armée de bijoux et de diamants : l’audace croissante des voleurs

21/02/2013

 

Par Marine Crubilé et Pierre Cabrol

En novembre dernier, à l’occasion d’un vol de bijoux survenu dans les locaux de la société Artcurial à la veille de leur vente aux enchères publiques[1], nous nous faisions l’écho du fait que les vols de bijoux sont aujourd’hui devenus monnaie courante en France[2]. Si la plupart de ces méfaits sont des vols à l’arraché commis par des voleurs opportunistes, qui s’en prennent à des victimes rencontrées au hasard, il arrive également que des bandes organisées s’attaquent à des maisons de ventes aux enchères publiques, ou, plus fréquemment, à des joailleries. La valeur du butin peut alors atteindre des sommets de nature à exciter les convoitises de bien des malfaiteurs. Pour le plus important de ces vols, soit le « casse » de la joaillerie Harry Winston, avenue Montaigne à Paris, survenu le 27 septembre 2004, le préjudice subi avait ainsi atteint un montant estimé de 85 millions d’euros[3].

En 2011 en France, 359 bijouteries[4] ont fait l’objet d’une attaque à main armée[5], soit beaucoup plus que les banques (56), plus que les stations-services (245), les grandes surfaces (245) et les restaurants et débits de boissons (320), mais moins que les petites et moyennes surfaces (474) et surtout que les bureaux de tabac et de PMU, tristes recordmans de la catégorie avec pas moins de 540 attaques[6]. Si les bijouteries ne sont pas les commerces les plus attaqués, il convient de noter qu’elles le sont malheureusement de plus en plus, avec un accroissement de 52,5 % entre 2008 et 2009, 21,5 % entre 2009 et 2010, et 23,8 % entre 2010 et 2011, alors que, si l’on effectue, par exemple, une comparaison avec les attaques de banque à main armée, il apparait que celles-ci ont diminuées de 30 % entre 2010 et 2011[7].

L’audace des voleurs de bijoux et de pierres précieuses en bande organisée ne semble plus guère aujourd’hui connaître de limites. Au-delà des bijouteries et joailleries traditionnelles, les malfaiteurs n’hésitent plus à s’en prendre aux salles des ventes[8], aux ateliers de fabrication, aux stands de joaillerie des Grands magasins, aux transports de pierres précieuses, etc.

Le mardi 19 février 2013, c’est à un stand de joaillerie situé à l’intérieur d’un Grand magasin que s’en sont pris deux malfaiteurs audacieux munis d’armes de poing. Peu avant 19 heures, ceux-ci ont attaqué, à visage découvert, le stand de la société De Beers dans le magasin du Printemps, boulevard Hausmann à Paris. Sous la menace de leurs armes, ils se sont fait remettre des bijoux pour une valeur qui atteindrait les trois millions d’euros, avant de prendre la fuite, l’opération n’ayant duré que quelques instants.

La veille à la même heure, soit le lundi 18 février 2013, s’était déroulée en Belgique une attaque à main armée d’un transport de pierres précieuses faisant irrésistiblement penser au scénario du film d’Henri Verneuil, Le clan des Siciliens, avec Jean Gabin, Alain Delon, Lino Ventura, etc. Si, en l’espèce, les malfaiteurs ne sont pas allés, comme dans le film, jusqu’à détourner un avion transportant des bijoux pour l’amener à se poser sur une autoroute, ils sont toutefois parvenus à réussir une opération que la plupart des spécialistes de la sécurité aéroportuaire auraient jugé impossible.

Les quatre auteurs des faits, déguisés en policiers, sont, en effet, parvenus à s’introduire sur le tarmac de l’aéroport de Bruxelles, ce alors même qu’ils étaient armés de fusils mitrailleurs[9]. Ils se sont alors approchés de personnels qui transféraient une cargaison de diamants d’un fourgon de la société Brink’s aux soutes d’un avion de la compagnie Swiss. Après avoir neutralisé, sans effusion de sang, les personnes présentes, ils se sont emparés de diamants[10] pour une valeur de 37 millions d’euros environ[11] et ont disparu sans être inquiétés, l’opération ayant duré moins de cinq minutes au total.


[1] L’enquête n’a pas, pour l’instant, aboutie.

[2] Cabrol P. et Crubilé M., 450 000 euros de bijoux volés à Paris, dans les locaux de la maison de ventes aux enchères Artcurial, dans la nuit du 23 au 24 novembre 2012, cerac33, 17 décembre 2012.

[3] Le butin avait été retrouvé dans les six mois.

[4] Entendu en un sens large regroupant également les joailleries et orfèvreries.

[5] Pour 5726 attaques à main armée recensées en 2011 toutes attaques confondues, soit une diminution de 7,62 % par rapport à l’année 2010, qui avait elle-même enregistrée une diminution de 12,38 % par rapport à 2009.

[6] Sans oublier les autres commerces de proximité qui totalisent, toutes activités confondues, 2364 attaques.

[7] La criminalité en France, Rapport 2012 de l’Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales (ONDRP), page 220.

[8] Voir, par exemple, l’article précédent cité en note 2.

[9] Ce qui amène à se demander, du point de vue de la lutte anti-terroriste, s’il n’y aurait pas sur ce site de graves failles de sécurité, ce qui est tout particulièrement inquiétant s’agissant d’un aéroport d’une capitale européenne.

[10] Une porte-parole de l’Antwerp World Diamond Centre, représentant les propriétaires des pierres précieuses, a déclaré qu’il s’agissait de diamants  taillés et bruts, en provenance d’Anvers et à destination de Zurich.

[11] Environ 50  millions de dollars.

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